Il m'arrive parfois d'être saisie d'un élan de philosophie. Je me sens toujours un peu pathétique après avoir écrit sur un sujet sérieux et profond, parce que les membres de ma famille m'ont toujours dit que la philosphie, c'était pour ceux qui s'ennuyaient et qui décidaient de se perdre dans le "trop compliqué". Très bien, me dis-je, j'ai le droit d'écrire de la philo, de toute façon je m'ennuie !
Aujourd'hui, c'était dans mon cours de mathématiques. (Mes plus sincères excuses à mon enseignent qui aurait probablement préféré que je fasse ma révision de fin d'année.) J'avais terminé mon document, à l'exception d'un numéro qui ne me disait absolument rien qui vaille. Je ne saurais dire pourquoi, je m'égarais souvent dans la brume de mes pensées. Même un terrible effort de volonté ne parvenait pas à m'en extraire. Alors j'ai pris un crayon, une feuille, et je me suis laissée aller.
Mesdames, messieurs, je vous présente... Mort lente.
La vie est une mort lente. Oui, ce n'est pas une blague. La vie est vraiment une mort. Une mort inéluctable, à la fois juste et injuste. Tout le long de son existence, l'homme approche de sa fin, du jour où il expirera son dernier souffle, son ultime râle. Chaque année, chaque mois, chaque semaine, chaque jour, chaque heure, chaque minute, chaque seconde est une nouvelle étape vers la conclusion.
L'humain ne vit pas de plus en plus à chaque anniversaire, il dépérit. Lentement, imperceptiblement au début, mais il dépérit tout de même, quoique les apparences en disent. Telle est la destinée. La destinée, oui, car ce n'est pas un but. C'est un épilogue inévitable, tout simplement, un coup fatal qui attendait son tour dans la file d'attente, depuis le tout premier instant de vie. Ce n'est ni triste ni dramatique. Ça ne mérite aucun apitoiement. Tout le monde ferme les yeux un jour pour un sommeil éternel - une sieste ? - alors tout le monde est, sur ce point, identique.
Vous qui lisez ceci, vous êtes en train de mourir. Vous qui ne lirez jamais ce texte, vous êtes mourant. Moi aussi je suis mourante. L'univers entier est mourant. Comme les lointaines étoiles qui nous semblent lumineuses mais qui en réalité ont déjà disparu depuis longtemps. Comme tout ce qui a l'air réel et qui ne l'est pas. Comme tout ce qui a vécu mais qui est enterré et retourné à son état initial d'air et de poussière.
Comprenez-vous la cohérence dans cet incohérence ? Ou l'incohérence dans la cohérence ? Peut-être que oui, peu-être que non. Peut-être est-ce faux, peut-être ne l'est-ce pas. Tout dépend de la signification que l'on donne à ses réalités. Mensonge ou vérité ? Les deux ? Mort ou étape, Paradis ou Enfer, triste ou joyeux, oui ou non, noir ou blanc ? Qu'est-ce que tout cela ? Si l'on décrit la mort, c'est qu'il y a une vie, quelque part, non ? La mort peut-elle exister sans la vie, et la vie sans la mort ? On prend pour acquis que la mort vient après la vie, mais est-ce l'inverse ? Ces deux mots qui décrivent tout ce qui existe ont été inventés pour mieux pouvoir les évoquer. Sauf que ce ne sont que des mots.
Vie lente, mort lente.
Ah ah. Ça ne veut rien dire, au fond. Ou tout.
Mais bon, pour simplifier la tâche, disons seulement que la vie est une vie, que la mort est une mort. Une mort ou la mort ?
Bref, je vous laisse à cet incohérence. À plus tard.